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La dermatillomanie, ou trouble de l’auto-traitement de la peau, est un trouble qui touche un nombre étonnamment élevé de personnes, souvent dans un silence lourd. Peu connu, encore plus rarement abordé dans les médias, ce trouble anxieux prend souvent la forme d’une addiction à la peau : gratter, percer, arracher, triturer des boutons, des croûtes, ou toute autre irrégularité visible ou ressentie sur la peau. Aujourd’hui, je souhaite mettre en lumière cette problématique en vous partageant un échange précieux avec Camille Montaz, spécialisée dans la dermatillomanie, qui a choisi de transformer son combat personnel en un véritable engagement pour aider les autres à se libérer de ce trouble.
Dans cet article, nous allons explorer ensemble son parcours, son témoignage et les étapes essentielles de guérison qu’elle a suivies. Mais aussi, nous découvrirons comment nous pouvons tous·tes, que nous soyons concerné·e·s ou non par la dermatillomanie, utiliser ses conseils pour mieux gérer nos émotions, notre hygiène de vie et notre bien-être général.
Qu’est-ce que la dermatillomanie ?
La dermatillomanie, également connue sous le nom de trouble de l’auto-traitement de la peau, est un trouble du comportement compulsif qui pousse les individus à se gratter, pincer, arracher ou percer leur peau de manière répétée, souvent sans pouvoir s’arrêter. Ce comportement, qui peut sembler bénin à première vue, prend des proportions bien plus graves lorsque la personne se retrouve prise dans un cercle vicieux difficile à briser.
Un trouble anxieux au cœur du comportement
La dermatillomanie est souvent déclenchée par des émotions négatives et des situations stressantes. Lorsqu’une personne ressent une anxiété profonde ou une tension émotionnelle, elle peut se tourner vers la peau comme un moyen d’apaiser ses émotions. Bien que l’acte de gratter ou de triturer puisse offrir un soulagement temporaire, c’est un soulagement illusoire qui ne fait que nourrir le cercle vicieux.
Les personnes atteintes de dermatillomanie n’ont pas de contrôle conscient sur ce comportement. Elles peuvent savoir, sur le moment, que cela leur fait du mal et que leur peau en souffre, mais elles continuent à agir ainsi malgré les conséquences physiques évidentes. C’est là que réside la grande complexité du trouble : il n’est pas simplement une habitude, mais bien une compulsion incontrôlable qui devient addictive.
Les zones affectées et les conséquences physiques
La dermatillomanie peut affecter n’importe quelle partie du corps, bien que certaines zones soient plus fréquemment touchées, notamment :
- Le visage : particulièrement les joues, le front, et autour des yeux, où des boutons ou irrégularités peuvent être perçus comme des imperfections insupportables.
- Le cuir chevelu : où la personne peut chercher à enlever des croûtes ou des petites irrégularités, parfois liées à des pellicules ou des cicatrices.
- Les bras et les jambes : zones où les personnes peuvent chercher à éliminer des boutons, des petites cicatrices ou des marques laissées par des irritations.
Le problème, cependant, ne réside pas uniquement dans l’endroit où le comportement se manifeste, mais aussi dans les conséquences physiques qu’il entraîne. En continuant à se triturer la peau, des lésions, des cicatrices et des infections peuvent apparaître, et à mesure que le temps passe, la peau devient de plus en plus abîmée. Cela crée une boucle de souffrance où chaque tentative de soulagement par le trituration conduit à des dégâts visibles, qui à leur tour renforcent l’anxiété et la culpabilité.
L’aspect psychologique et émotionnel
Au-delà des effets physiques, la dermatillomanie a des répercussions profondes sur le bien-être psychologique. L’une des plus grandes souffrances est celle de la culpabilité. Les personnes atteintes peuvent se sentir honteuses et impuissantes face à leur comportement. Elles savent que cela leur fait du mal, mais se retrouvent piégés par une compulsion qu’elles ne parviennent pas à maîtriser. Ce sentiment de honte peut entraîner un isolement social et une perte de confiance en soi.
Les personnes qui souffrent de dermatillomanie peuvent également développer une perception déformée de leur peau, qu’elles considèrent souvent comme terrible ou inesthétique. En scrutant chaque imperfection à la loupe et en s’y attardant de manière obsessionnelle, elles peuvent être dans l’incapacité de voir la peau sous un angle plus positif. Au lieu de voir une peau humaine normale avec quelques imperfections, elles ne voient que des cicatrices, des imperfections ou des boutons.
Un trouble souvent invisible
L’un des plus grands défis pour les personnes atteintes de dermatillomanie est qu’il s’agit d’un trouble souvent invisible aux yeux des autres. Contrairement à d’autres troubles anxieux ou comportementaux, les signes de la dermatillomanie peuvent être cachés sous des vêtements ou sous des gestes discrets. Cela rend d’autant plus difficile pour l’entourage de comprendre l’ampleur du problème. De plus, en raison de la stigmatisation sociale autour de la santé mentale et des troubles du comportement, les personnes atteintes peuvent avoir du mal à en parler, se sentant seules et incomprises.
C’est pourquoi des échanges comme celui de Camille Montaz sont essentiels. En partageant son expérience, elle nous aide à comprendre que dermatillomanie est un trouble qui ne se résume pas à une mauvaise habitude, mais à une souffrance psychologique réelle. Elle nous rappelle également que, bien que peu connu, ce trouble peut être surmonté grâce à une prise en charge appropriée et à un travail sur soi.
Un comportement compulsif, mais guérissable
Malgré la nature compulsive de ce comportement, la dermatillomanie peut être traitée. En prenant conscience du trouble, en consultant des professionnels spécialisés dans les troubles comportementaux, et en mettant en place des stratégies d’adaptation, il est possible de se libérer de ce cercle vicieux.
Il est crucial de comprendre que la dermatillomanie n’est pas un défaut de volonté, mais bien un trouble psychologique qui nécessite une approche globale, comprenant à la fois un travail sur les émotions, la gestion du stress, et parfois un accompagnement thérapeutique. Les personnes atteintes peuvent retrouver une meilleure relation avec leur peau et leur image corporelle, tout en apprenant à gérer leur anxiété et à prendre soin d’elles de manière plus saine et plus bienveillante.
Dans cet épisode de podcast avec Camille Montaz, nous avons exploré non seulement les causes profondes de la dermatillomanie, mais aussi des solutions concrètes pour s’en libérer. Le message clé est clair : la guérison est possible. L’essentiel est de reconnaître le trouble, de ne pas se laisser définir par lui, et de commencer un travail de guérison à la fois intérieur et extérieur.
En diffusant des témoignages comme celui de Camille, nous contribuons à faire tomber les tabous autour de ce trouble et à offrir des ressources à celles et ceux qui en ont besoin.
L’histoire inspirante de Camille Montaz
Dans l’épisode de « Les Résilientes », Camille Montaz nous raconte son parcours personnel avec la dermatillomanie, un combat qui a débuté pendant son adolescence, une période déjà marquée par les doutes et les complexes. Camille nous parle avec sincérité de son expérience : elle explique comment, dès qu’elle a pris conscience de ce trouble, elle a eu du mal à comprendre qu’il y avait un nom pour ce qu’elle vivait. Bien que la dermatillomanie soit peu connue, Camille a découvert, en cherchant sur Internet, qu’elle n’était pas seule. Ce moment fut une révélation pour elle : comprendre que ce comportement avait des racines profondes et qu’il s’agissait d’un trouble anxieux a été un premier pas vers sa guérison.
Mais la découverte d’un nom ne suffit pas toujours à résoudre le problème. Camille a dû faire face à un cercle vicieux où le fait de triturer sa peau devenait une sorte de rituel apaisant qui, sur le moment, soulageait son anxiété, mais laissait ensuite place à des conséquences douloureuses. Rougeurs, croûtes, lésions enflammées… Ces signes visibles de son trouble nourrissaient sa culpabilité et renforçaient son sentiment d’isolement.
Les étapes clés de sa guérison
1.La prise de conscience et l’acceptation : la première étape du processus de guérison de Camille a été d’accepter qu’elle avait un trouble. L’acceptation est souvent le passage obligé, mais le plus difficile. Camille a dû se détacher de l’idée que c’était de sa faute et comprendre qu’elle vivait avec un trouble psychologique qu’elle ne pouvait pas résoudre seule. Cela ne signifie pas qu’elle se résignait à vivre avec, mais plutôt qu’elle reconnaissait le problèmepour pouvoir ensuite y faire face.
2. La thérapie : un travail de longue haleine Camille a également partagé son expérience avec les thérapies comportementales et cognitives (TCC), qui l’ont aidée à identifier les déclencheurs de ses crises et à changer les comportements qui alimentaient son trouble. Les TCC, en s’appuyant sur des exercices pratiques et des observations régulières, ont été un excellent outil pour elle, bien que ce ne soit pas la solution pour tout le monde. Camille a aussi exploré d’autres approches complémentaires comme l’EFT (Emotional Freedom Techniques) et l’hypnose, qui lui ont permis de réduire son anxiété et de mieux comprendre ses émotions.
3. Reprendre en main son hygiène de vie : l’un des aspects cruciaux que Camille a abordé dans cet épisode est l’importance de l’hygiène de vie. Un corps sain, une alimentation équilibrée et un système digestif en bonne santé jouent un rôle déterminant dans la gestion du stress et de l’anxiété. Camille a adopté une approche holistique pour sa guérison, en prenant en compte l’ensemble de son bien-être physique et émotionnel. Elle a aussi réalisé que certaines habitudes alimentaires pouvaient influencer ses crises, et en ajustant son alimentation et en intégrant des compléments alimentaires, elle a vu une amélioration notable.
4. Vivre avec le trouble et se détacher de l’identification : un des moments les plus forts de notre conversation avec Camille a été celui où elle a évoqué l’identité. Quand on vit avec un trouble, il est facile de commencer à s’identifier à lui, à le laisser devenir une partie de nous. Camille a souligné qu’il est crucial de se détacher de la maladie et de ne pas s’en faire une identité. Ce processus de guérison passe par une meilleure compréhension de soi, en se concentrant sur des pratiques qui nourrissent son corps et son esprit. L’amour de soi et la bienveillance envers soi-même sont essentiels pour avancer.
Conseils pratiques pour celles qui souffrent de dermatillomanie
Camille partage plusieurs conseils essentiels pour celles qui vivent avec la dermatillomanie et souhaitent entamer leur propre chemin de guérison :
1. Accepter le trouble : reconnaître qu’il s’agit d’un trouble réel
La première étape dans le processus de guérison est souvent la plus difficile, mais c’est aussi la plus libératrice : accepter que la dermatillomanie est un trouble réel et non une simple mauvaise habitude ou un défaut de volonté. Cette reconnaissance est fondamentale pour se détacher de la culpabilité qui accompagne fréquemment ce trouble. Beaucoup de personnes qui souffrent de dermatillomanie ont tendance à se juger sévèrement, à se dire qu’elles sont faibles ou incapables de se contrôler. Cependant, il est essentiel de comprendre que ce comportement compulsif est une réponse à un stress interne, une anxiété ou une forme de malaise psychologique.
Cette prise de conscience permet non seulement de se détacher du sentiment de honte, mais aussi de commencer à se traiter avec bienveillance. La guérison commence dès que l’on se permet de reconnaître que ce trouble n’est pas une faiblesse personnelle, mais un défi qui peut être surmonté.
2. Se mettre en action : ne pas attendre un déclic magique
Beaucoup de personnes qui souffrent de dermatillomanie attendent un déclic, un événement marquant qui changerait leur perception du trouble. Mais, comme Camille le souligne, ce déclic ne viendra pas toujours de manière magique. Il est essentiel de prendre des mesures concrètes pour modifier les habitudes et les comportements associés à ce trouble. Cela peut commencer par observer attentivement ce qui déclenche les crises : est-ce un moment particulier de la journée ? Une situation de stress ? Un sentiment d’anxiété ? En identifiant les déclencheurs, vous pourrez commencer à réagir différemment face à ces moments-là, en choisissant des stratégies alternatives pour apaiser vos émotions.
L’action ne consiste pas seulement à stopper le comportement de trituration, mais à adopter un plan d’action personnalisé pour gérer le stress, l’anxiété ou d’autres émotions difficiles. Par exemple, pratiquer la méditation ou des respirations profondes à chaque crise, ou encore tenir un journal pour exprimer les émotions qui émergent, peut vous aider à prendre du recul et à remplacer le geste compulsif par des actions plus saines.
3. Changer l’hygiène de vie : améliorer l’alimentation et la santé mentale
Un autre aspect crucial du processus de guérison réside dans l’amélioration de l’hygiène de vie. Camille insiste sur l’importance d’une alimentation équilibrée et adaptée à la santé mentale. Cela ne signifie pas forcément se lancer dans des régimes stricts, mais plutôt ajouter progressivement des aliments bénéfiques pour soutenir votre bien-être émotionnel et physique. Par exemple, les légumes, les graines, les oléagineux, et les aliments riches en oméga-3 sont d’excellents alliés pour favoriser une bonne humeur, réguler les émotions et stabiliser l’énergie.
Il est important de se rappeler que les régimes drastiques ou trop restrictifs peuvent avoir un effet inverse, en diminuant l’énergie et en amplifiant l’anxiété. Le but n’est pas de forcer une transformation radicale, mais d’intégrer progressivement des choix alimentaires qui nourrissent le corps et l’esprit, tout en évitant les carences nutritionnelles qui peuvent affecter l’humeur et la gestion du stress.
4. Consulter des professionnels : l’accompagnement thérapeutique est essentiel
La dermatillomanie est un trouble complexe qui peut nécessiter l’accompagnement de professionnels qualifiés. Les thérapies comportementales et cognitives (TCC) sont l’une des méthodes les plus efficaces pour traiter ce trouble, car elles aident à identifier et modifier les pensées et comportements qui conduisent à la trituration compulsive. Camille a personnellement trouvé une grande aide dans ce type de thérapie, mais elle recommande également d’explorer d’autres approches thérapeutiques, telles que l’EFT (Emotional Freedom Techniques) ou l’hypnose, qui peuvent être bénéfiques pour certaines personnes.
Il est important de ne pas minimiser la nécessité d’un accompagnement. Bien que le travail sur soi soit essentiel, il est également crucial de se donner l’autorisation de demander de l’aide professionnelle pour surmonter un trouble aussi enraciné. L’accompagnement peut offrir une perspective extérieure, des outils pratiques et un soutien constant pour avancer.
5. Ne pas se cacher : le soutien est primordial
Un aspect fondamental du processus de guérison est de ne pas rester dans l’isolement. Parler à ses proches de ce trouble, bien que cela puisse être difficile au départ, est une étape libératrice. Le soutien des amis, de la famille ou d’un groupe de soutien spécialisé peut apporter consolation, compréhension et des ressources supplémentaires pour mieux gérer les crises.
Camille partage son expérience sur l’importance de sortir du secret. Cacher le trouble ne fait qu’alimenter la souffrance et l’anxiété. Le fait de se confier à des personnes de confiance crée une connexion humaine qui brise le cercle vicieux de l’isolement. De plus, il est utile de s’entourer de personnes qui comprennent le trouble ou qui sont prêtes à vous soutenir sans jugement. Il existe également des groupes de soutien en ligne et des forums où vous pouvez partager votre expérience et trouver des conseils et des encouragements.
Conclusion : guérir de la dermatillomanie, c’est possible
La dermatillomanie, bien qu’encore méconnue, peut être guérie. C’est un chemin de guérison qui demande du temps, de la persévérance et une approche globale de notre bien-être. Camille Montaz nous montre que, même dans les moments les plus sombres, il est possible de trouver des solutions et de transformer une souffrance en une force. Grâce à son témoignage inspirant et ses conseils pratiques, nous pouvons toutes mieux comprendre ce trouble, l’accepter, et entreprendre un voyage vers une guérison durable.
Si vous ressentez le besoin d’être accompagnée, sachez que vous n’êtes pas seules. Le chemin de la guérison commence par un premier pas vers l’acceptation et l’action.
Camille Montaz, à travers son site peaussible.fr et son livre « Mon histoire avec la dermatillomanie », partage avec générosité son parcours et ses ressources. Vous pouvez la suivre sur Instagram (@peau.ssible) et découvrir son livre Mon histoire avec la dermatillomanie, c’est possible.
Vidéo de l’épisode sur YouTube
Vous pouvez retrouver l’intégralité de cet épisode sur ma chaîne YouTube, où Camille partage son histoire en vidéo, pour encore plus d’inspiration et de résilience :
Vous pouvez également écouter l’épisode sur toutes vos plateformes d’écoute préférées :
Transcription de l’épisode
Voici la transcription complète de cet épisode pour ceux qui préfèrent lire l’échange entre Camille et moi :
Caroline Lepinteur : Bienvenue dans un nouvel épisode des Résilientes. Aujourd’hui, j’ai l’honneur de recevoir une femme dont le parcours est une véritable source d’inspiration. Camille Montaz, ex-dermatillomane et patiente experte, a transformé son combat personnel contre la dermatillomanie en une mission pour aider les autres à s’en sortir.
À travers son compte Instagram Peau.ssible et son livre Mon histoire avec la dermatillomanie, s’en sortir c’est peaussible, Camille partage avec authenticité et générosité son histoire, ses failles et les outils qui l’ont aidée à surmonter ce trouble. Peu connu aujourd’hui, elle est une voie essentielle pour toutes celles et ceux qui luttent en silence.
Dans cet épisode, nous allons plonger au cœur de son expérience, explorer les étapes clés de sa résilience et comprendre comment elle est parvenue à transformer sa vulnérabilité en force. Bienvenue Camille dans Les Résilientes, et merci.Très heureuse de t’avoir ici. Est-ce que tu peux, c’est la question que je pose à chaque fois, te présenter avec tes mots, s’il te plaît ?
Camille Montaz : Oui, bien sûr. Du coup, je m’appelle Camille. J’ai 34 ans, je vis à Annecy et j’ai créé ce projet Possibleen avril 2019. Ça commence à faire un moment. Mais à côté de ça, j’ai une formation d’école de commerce et j’ai travaillé longtemps dans la communication. Et je suis encore freelance, d’ailleurs dans la communication.
Et sinon, j’ai une petite fille qui est née cet été, il y a trois mois et demi. Et voilà. Est-ce que tu as besoin d’autres infos ?
Caroline Lepinteur : Non, c’est parfait. Parce que tu vas, tu vas aller en profondeur dans ton parcours avec la dermatillomanie. Est-ce que tu peux nous raconter comment ce trouble est apparu dans ta vie ? Et peut-être avant, qu’on puisse plonger dans ce terme qui est peut-être inconnu pour les personnes qui nous écoutent, l’expliquer ? Parce que c’est vrai que, moi, très franchement, je ne connaissais pas la dermatillomanie avant de te connaître.
Camille Montaz : Oui, c’est vraiment un trouble qui est peu connu, mais pourtant qui touche énormément de personnes. Et je suis sûre qu’en écoutant ce podcast, il y a peut-être des gens qui vont se dire « Ah, mais j’ai fait ça, au moment où je fais ça maintenant, ou je connais quelqu’un qui fait peut-être ça. »
Donc merci en tout cas de m’inviter et de me permettre de diffuser aussi cette parole, parce que je pense que c’est important. Et du coup, comme son nom l’indique, la dermatillomanie, c’est un trouble qui touche la peau et c’est un trouble via lequel on va tout le temps gratter, percer, arracher, triturer les reliefs qu’on peut sentir ou voir sur sa peau.
Donc ça peut être vraiment sur toutes les zones de la peau, autant le visage que le cuir chevelu, la poitrine, les jambes, les bras, le dos, les talons. Enfin vraiment, toutes les zones peuvent être concernées et on va arracher des reliefs. Donc ça peut être autant des boutons, des points noirs, des croûtes, des peaux mortes, des irrégularités qu’on voit ou qu’on sent en passant la main.
Et c’est un trouble anxieux. Donc, en fait, souvent, il y a des émotions qui sont à la base de ce comportement-là. Le fait de triturer, d’arracher, de lisser, ça va apaiser une sorte de part de nous, ça va nous faire du bien. Et c’est ça qui va faire qu’on va tout le temps répéter ce comportement, vraiment comme une addiction.
D’ailleurs, c’est considéré comme une addiction, et c’est un trouble qui touche majoritairement les femmes. Donc, ça, c’est un gros sujet, je pense. Ça doit sûrement être lié aussi à toute cette société de l’image, de la valorisation, de la peau parfaite, etc. On pourrait dire là-dessus. Mais en tout cas, voilà, ça touche surtout des femmes et souvent des personnes qui ont un profil un peu anxieux, un peu perfectionnistes.
Caroline Lepinteur : Super. Donc, à quel moment as-tu découvert que ce que tu vivais portait un nom, la dermatillomanie, et qu’as-tu ressenti en le réalisant ?
Camille Montaz : Alors moi, j’ai eu de l’acné à l’adolescence, comme beaucoup de personnes. Et je me souviens que je l’avais vraiment mal vécu. J’ai vraiment vu ces boutons comme des intrus, comme quelque chose qui me dénaturait, entre guillemets. Alors, je pense que personne ne vit bien ça, mais dans mon histoire, j’ai la sensation que ça a vraiment pris des proportions démesurées. J’avais vraiment cette envie de lisser ma peau et d’enlever ces imperfections. Là, ça me mettait vraiment mal. Et en fait, j’ai commencé juste un jour à me dire « Tiens, je vais regarder d’un peu plus près ma peau, je vais essayer d’enlever ce que je vois. »
Mais petit à petit, c’est comme ça qu’une sorte de rituel s’est mis en place. Parce qu’on va être tous les soirs, quand je rentrais chez moi, j’allais me coller devant un miroir pour regarder comment était ma peau et si des nouvelles choses étaient apparues dessus. Et surtout, je me rendais compte que gratter, lisser, arracher comme ça, sur le coup, ça me détendait. En fait, ça me faisait du bien, aussi curieux que ça puisse paraître.
C’est comme si le temps s’arrêtait, que j’étais un peu dans un moment suspendu en faisant ça. Et en fait, après, je sortais de ça, de ce qu’on peut appeler un peu comme une trance, parce que finalement, on ne voit pas le temps passer. On pense à rien, on est 100% concentré sur ce qu’on fait, et là, je réalisais et je regrettais, mais pour autant, le cercle vicieux continuait.
Et du coup, j’avais une peau de plus en plus abîmée. Tu vois, j’avais des rougeurs, des croûtes, des lésions qui s’enflammaient, qui saignaient, etc. Et c’est à ce moment, au bout de quelques mois, que je me suis dit « C’est quand même bizarre, j’ai l’impression que les autres personnes ne font pas ça. Je suis un peu seule à avoir ce comportement avec ma peau. »
Les autres personnes n’ont pas aussi l’aspect de ma peau. Enfin, ils ont des boutons parfois, mais moi, c’était des croûtes. C’était vraiment une peau qui est en reconstruction, un peu vallonnée, un peu un aspect spécifique. Et du coup, je me suis dit qu’il y a quelque chose qui ne va pas, mais au début, vu que ce trouble n’est pas connu, qu’on n’en parlait pas, moi, en fait, je me disais juste « J’ai un problème de volonté. J’ai une obsession autour de ma peau, mais je n’arrive pas à m’empêcher de la triturer. »
Je me disais vraiment que c’était de ma faute et qu’en fait, il fallait que je me raisonne et qu’à force de volonté, j’allais arriver à arrêter. Donc, après chaque crise, entre guillemets, je me disais « Ok, c’était la dernière fois, maintenant. Tu as vu que ça te fait du mal, que tu te sens pas bien avec ça. Donc, tu vas arrêter. » Et en fait, ça a recommencé sans cesse, sans cesse, sans cesse. Et en fait, il a fallu quand même des années en vivant comme ça pour que je me dise « Non, mais là, c’est pas possible. Il doit y avoir quelque chose. Je ne comprends pas pourquoi ça se répète sans cesse et je n’arrive pas à arrêter. »
Et là, j’avais tapé en fait sur Google. Je ne sais plus, genre obsession, triage de boutons, ou quelque chose comme ça. Et j’étais tombée sur des articles qui parlaient de ce mot, de dermatillomanie. Et donc, j’avais tapé dermatillomanie sur Facebook après, et j’avais trouvé des groupes de soutien, mais en anglais, avec le terme skin picking.
Mais en fait, des personnes vraiment partageaient ma vie, tu vois. Elles montraient des photos de leur peau. C’était exactement l’aspect de ma peau. Elles partageaient leur détresse, leur peur, comment elles s’étaient fait ça sur la peau. Je me suis dit, mais c’est pas possible, en fait, c’est exactement moi. Et ce moment, c’était incroyable, parce que là je me suis dit « Wow, je ne suis pas seule. » Et en fait, manifestement, c’est un trouble. Et donc, si c’est un trouble, ça veut dire qu’il y a peut-être aussi des solutions pour aller mieux. Donc, c’est comme ça que ça a commencé.
Caroline Lepinteur : Du coup, ça a eu un sacré impact sur ton adolescence.
Camille Montaz : Ah ben, oui. Parce qu’en fait, même si tout le monde a de l’acné à l’adolescence, moi, j’avais la sensation que c’était un vrai problème. En fait, il y avait plusieurs choses. Déjà, j’avais une sorte de tabou lié à ça, parce que je savais que toutes ces lésions sur ma peau, c’était moi qui me les étais infligées. Ce n’est pas pareil que de souffrir d’acné, en fait, de voir le matin des nouvelles irrégularités sur sa peau.
On se dit « Vivement que l’adolescence soit finie », mais moi, en fait, c’était des cicatrices. Ça, c’était au fond de moi, je m’en voulais. Je culpabilisais. Je me disais « Je me sens mal dans ma peau, mais c’est de ma faute, entre guillemets. » Et surtout, ce qui est important de dire, c’est que moi, ça a commencé avec l’acné, mais ce n’est pas toujours le cas.
Il y a certaines personnes qui vont auto-créer leur propre lésion en triturant, en créant une sorte de croûte et en l’arrachant sans cesse, ou alors en étant tout le temps en train de triturer un peu. Et donc en créant plein de micro-lésions qui vont tout le temps se rouvrir, ou alors avec des piqûres d’insectes, ou tu vois ce genre de choses.
Et du coup, moi, je pense que si je n’avais vraiment pas touché ma peau, au bout de quelques mois, j’aurais peut-être eu moins d’acné. En fait, j’ai vraiment entretenu un cercle vicieux aussi sur ma peau, qui, à la base, n’avait pas tant de problèmes que ça, à cause de ma trituration. Et le problème, c’est qu’en fait, quand on a une peau qui est abîmée, on va se priver de certaines sorties.
On va se sentir aussi plus mal à l’aise dans les interactions sociales. Donc, on va se cacher. Je me souviens qu’au collège, je mettais tout le temps mes cheveux un peu devant mon visage. Je n’osais pas trop regarder les gens dans les yeux. Ça a un impact énorme en fait sur ton développement en tant qu’adolescent, et ton rapport aux autres. Il y a plein d’activités que tu te prives de faire, comme se baigner, comme…
Aller dormir chez des gens, parce qu’en fait, tu ne veux pas qu’ils te voient sans maquillage ou… Tu as peur qu’ils fassent des remarques sur ta peau. Donc oui, ça a eu un vrai impact sur mon adolescence et sur la façon dont je me sentais à cette période-là de ma vie.
Caroline Lepinteur : Et tu parlais tout à l’heure, tu sais, des causes anxieuses à l’origine de ce trouble. Tu étais quelqu’un d’anxieux ?
Camille Montaz : Pas à l’époque, mais c’est une bonne question parce que justement, avec du recul, je ne me considérais pas comme anxieuse. Tu vois, je pense qu’il y a beaucoup d’idées reçues autour de l’anxiété. En fait, on imagine une personne anxieuse qui est soit paralysée quelque part, soit au contraire, un peu à aller dans tous les sens.
Tu vois, moi, je ne me serais pas dit « Je suis anxieuse ». Alors, en fait, je pense que l’anxiété, elle peut avoir des formes hyper variées. Et parfois, l’anxiété, c’est aussi avoir toujours peur des blancs dans les discussions et du coup, se sentir toujours obligé de relancer la parole. Ou alors avoir peur du vide et du silence, et de vouloir toujours occuper un peu l’espace autour de soi.
Ou alors prévoir toujours d’arriver méga en avance, parce qu’on a des peurs, ou alors avoir toujours un peu le moulin qui tourne dans la tête. Moi, tu vois, j’avais beaucoup ces choses-là, mais c’était ma réalité. Donc, parfois, tu ne t’imagines pas que ça pourrait ne pas être et qu’il existe un état en dehors de cet état anxieux.
Donc oui, je pense que j’ai été anxieuse, beaucoup liée à la peur de l’échec et un très très fort perfectionnisme. Donc toujours beaucoup de pression que je me mettais sur moi, sur ce que je faisais, sur l’image que je renvoyais aux autres, etc.
Caroline Lepinteur : Qu’est-ce qui t’a donné l’élan, du coup, pour entamer ton chemin vers la guérison et quelles ont été les premières étapes que tu as pu franchir ?
Camille Montaz : Je pense que l’élan, il est vraiment parti de la souffrance. En fait, d’un moment où on se dit, « Mais ça fait des années que je vis comme ça, que j’ai la sensation d’avoir essayé plein de choses et que ça ne fonctionne pas. » Et j’en avais parlé avec une amie qui me disait « Mais en fait, si t’as essayé autant de choses et que ça ne fonctionne pas, il faut peut-être essayer une autre méthode, peut-être que juste dire ‘Demain j’arrête’, faire des challenges pour ne pas toucher ta peau, juste acheter plein de cosmétiques pour faire cicatriser ta peau ou cacher les miroirs, ça ne va pas marcher. »
En fait, c’est peut-être pas ça la bonne méthode pour aller mieux. Et à ce moment-là, je me suis dit : « Ok, il faut que je teste autre chose. » Et c’est là que j’ai pris un premier rendez-vous avec un psy pour me dire, voilà, peut-être que lui saura quoi faire et qu’il aura une solution.
Alors je pense qu’à ce moment-là, je n’étais pas forcément dans la bonne démarche parce que justement j’attendais, entre guillemets, qu’on me sauve. Tu vois, j’avais un peu vu le psy comme un sauveur, et je m’étais un peu dit « En faisant cette thérapie, je vais lui dire des choses, et puis lui, en fait, en retour, il va me transformer, entre guillemets, en une personne guérie. »
Et je pense qu’après la guérison, ça a été un long chemin avec plein d’étapes, mais cette prise de conscience a été fondatrice. C’est qu’en fait, aller me sauver, c’était moi qui devais… comprendre des choses, mettre en place des actions concrètes et changer plein d’habitudes que j’avais créées au fil des années pour aller mieux. Parce que finalement, une addiction, un trouble comme ça, c’est un maillage de comportements qui entretiennent le cercle vicieux.
Il allait falloir que je déconstruise tout ça petit à petit.
Caroline Lepinteur : Donc tu as fait de la thérapie comportementale et cognitive (TCC) ?
Camille Montaz : Au début, j’avais vu un psychiatre parce que j’étais étudiante, et il y avait une prise en charge par la sécurité sociale. Donc moi, je ne pouvais pas me payer une thérapie à l’époque, et ça m’avait aidée d’en parler. En tout cas, déjà pour la première fois, d’en parler à quelqu’un de neutre. Il y avait beaucoup d’émotions qui sont sorties, et je pense que ça, c’est déjà une première étape. Même si parfois, on a l’impression que ça sert à rien, qu’on va juste pleurer devant un thérapeute. En fait, ça fait quand même une sacrée libération à l’intérieur.
C’est souvent une première étape importante. Et après, en effet, j’ai fait une TCC, donc thérapie comportementale et cognitive. Et ça, je pense que c’est, en tout cas pour moi, ça m’a vraiment aidée, même si tout le monde n’est pas forcément à l’aise avec les thérapies par la parole. Certains n’arrivent pas à mettre des mots sur ce qu’ils ressentent et sur ce qu’ils vivent.
Camille Montaz : Et dans ce cas-là, d’autres approches sont adaptées. Mais moi, ça m’a aidée à bien comprendre, en tout cas, le trouble, et surtout à travailler sur toutes ces habitudes, ces pensées, ces croyances, ces émotions qui étaient associées au trouble. J’ai vraiment pris le temps de remplir des tableaux, d’observer, de comprendre ce qui déclenchait mes crises et comment on allait pouvoir agir dessus.
Donc, j’ai vraiment travaillé là-dessus. Et puis après, il y a eu plein d’autres approches que j’ai testées et qui, je pense, chacune m’ont fait avancer, tu vois, d’un petit pas. Donc j’ai aussi fait de l’EFT. J’ai aussi fait de l’hypnose, et je pense que chaque fois ça m’a soit apaisée et donc permis d’être dans de bonnes conditions pour avoir la motivation de changer des choses, soit permis de comprendre des choses sur moi.
Je pense que tout parcours de guérison est différent, et il faut aller vers les approches qui nous parlent. Mais en tout cas, moi, la TCC, l’hypnose, ce sont des choses qui m’ont beaucoup aidée. Et puis aussi tout ce qui est travail sur son hygiène de vie, parce que je sais que je parle à une convaincue, mais…
Les liens qu’il y a entre le système digestif et le système nerveux, quand on se sent bien dans son corps, quand on mange de façon adaptée, quand on bouge assez, quand on n’a pas de carences, en fait, il y a aussi des répercussions énormes sur la façon dont on se sent dans sa tête. Et ça, je n’en avais pas du tout conscience.
C’est vraiment… j’ai découvert ça, et puis après, j’ai plongé là-dedans comme dans un monde où il y a plein de choses à découvrir : de la lecture, des choses à tester, etc. Et ça m’a passionnée. D’ailleurs, je me suis aussi formée en naturopathie comme toi, même si je ne l’exerce pas aujourd’hui. Et ça, ça m’a énormément aidée parce que je trouve vraiment que reprendre en main son hygiène de vie, ça a un impact mais tellement énorme sur notre santé mentale. C’est fou. Et d’ailleurs, je suis persuadée qu’en parallèle de tout le travail de thérapie, on devrait faire aussi ce travail sur notre hygiène de vie, parce que quand on fait ça, ça décuple complètement les résultats qu’on peut avoir grâce à une thérapie.
Caroline Lepinteur : Complètement. Et je vois tellement de liens dans ce que tu dis avec ce que je transmets dans mes accompagnements. Le travail sur l’hygiène de vie, sur l’alimentation, c’est fondamental. Je pense qu’on sous-estime beaucoup son impact. Donc, bravo pour cette prise en main. Et donc, tu as vu des résultats après tout ce travail, mais il t’a fallu combien de temps pour voir des améliorations visibles, par exemple, dans ta peau ?
Camille Montaz : Alors, c’est un gros sujet aussi, ce sujet de la « belle peau », parce que déjà, je pense que quand on souffre de dermatillomanie, on fait aussi ce qu’on appelle de la dysmorphophobie. C’est-à-dire qu’on a une vision déformée de nous-mêmes et de notre peau. Donc souvent, en fait, on voit notre peau vraiment comme catastrophique, amplifiée, tout est zoomé, tout est aggravé. Et voilà, si on pouvait vraiment se mettre dans les yeux d’une personne qui nous voit en face, on se dirait : « Ah oui, en fait, elle me voit comme ça. »
Alors que parfois, on a l’impression d’être un monstre. C’est délicat de parler de belle peau, parce que je pense qu’en plus, c’est un objectif qui ne doit pas nous motiver, parce que c’est ça qui peut aussi nous déconnecter de tout. Travailler sur notre hygiène mentale, notre bonheur, notre stabilité émotionnelle, etc.
Mais bon, en tout cas, on va dire que le moment où j’ai senti que ça allait mieux au global, autant sur la peau que dans mes relations, dans mon rapport à moi-même, je pense que ça a mis au moins entre trois et cinq ans, sachant que j’ai passé 10 années sans connaître le mot « dermatillomanie », à juste essayer de m’en sortir en me disant « demain, j’arrête », tu vois, à force de volonté sans comprendre qu’il y avait tout un truc à explorer en dessous. Et le moment où j’ai compris ça, où j’ai commencé à agir vraiment via la thérapie, via la TCC, via des changements d’habitude, etc., on va dire que ça a pris entre trois et cinq ans pour vraiment que je vois une amélioration.
Même si en fait, au fil du chemin, il y a eu plein de petites améliorations. Tu vois, au bout de cinq ans, je me sentais vraiment libérée de ce trouble, dans le sens où j’étais en connaissance de moi-même et je savais comment éviter les crises, etc. Mais sur tout le chemin, j’ai eu plein de hauts et de bas, mais avec une avancée notable, c’est sûr. Ce que parfois ça peut être décourageant si on dit aux gens : « À partir du moment où vous vous prenez en charge, ça va prendre cinq ans. » Non, parce qu’en fait, il y aura plein de petites victoires au fil du chemin.
Caroline Lepinteur : Oui, c’est ça. Et puis, je suis sûre que ça a eu un impact sur plein d’autres aspects de ta vie. Par exemple, ton énergie, ta digestion, ton bien-être général, tout ce travail sur ton mode de vie a dû aussi améliorer la gestion de ton système nerveux, par exemple.
Camille Montaz : Exactement. Et aussi tout ce qui est santé hormonale. Parce qu’en fait, on sait aussi que, en tout cas pour moi, dans le cadre de la dermatillomanie, j’avais vraiment une aggravation des crises avant mes règles, parce que les changements hormonaux liés au cycle font que, par exemple, juste avant les règles, on va avoir une baisse de sérotonine.
Donc, cette hormone qui va nous aider à nous réguler, à nous apaiser, etc., elle baisse avant les règles. Or, si on a déjà un comportement un peu anxieux et qu’on a tendance à se réfugier quand on a de l’anxiété dans le triage, forcément, il y a aussi une aggravation à ce moment du cycle. Et moi, c’était le cas, et j’avais un syndrome prémenstruel qui était très fort et qui s’accompagnait vraiment de crises assez violentes.
Et c’est vrai qu’en travaillant aussi sur mon cycle, en comprenant comment il fonctionnait, comment atténuer justement ce syndrome prémenstruel avec les bons compléments, avec la bonne alimentation, j’ai aussi vu une amélioration immense de mon état avant mes règles et donc aussi une diminution des crises à ce moment-là. Donc, tu vois, ça a été un tout. Et je pense qu’équilibrer aussi ces hormones, c’est ce qu’on disait tout à l’heure, ça joue surtout sur notre humeur tout au long du mois, sur notre motivation à faire des choses.
Moi, je suis vraiment… enfin, je pense que tu es comme moi, mais je suis vraiment partisane d’une guérison qui est holistique. On ne peut pas juste se dire « Pour sortir de la dermatillomanie, il faut travailler sur sa peau et il faut aider sa peau à mieux cicatriser ou alors enlever l’acné ». En fait, non, ça, ça va être… Oui, ça peut aider, bien sûr. Mais la guérison, c’est un tout. C’est vraiment apprendre à mieux gérer ses émotions, apprendre à mieux gérer ses hormones, avoir un meilleur équilibre de vie avec des temps pour soi, avoir une alimentation qui nous convient vraiment à nous et pas ça aussi. C’est un énorme sujet. Il y aurait tellement à dire, mais il n’y a pas d’alimentation type. On est tous différents, on a tous des corps différents. Certaines personnes ne vont pas du tout supporter de se faire des grosses salades avec plein de cru et plein d’aliments santé dedans.
Et en fait, ce qu’il faut, c’est se connaître soi. Observer comment on digère, comment on se sent quand on mange telle ou telle chose et trouver ce qui nous correspond à nous. Donc, je pense que c’est tout ça. C’est un tout.
Caroline Lepinteur : Complètement. Justement pour celles et ceux qui souffrent de dermatillomanie, tu proposes des accompagnements et tu as aussi écrit un livre à ce sujet. Tu partages beaucoup de contenu sur ce trouble à travers ton compte Instagram, mais est-ce que tu aurais quand même quelques conseils essentiels que tu aimerais peut-être leur donner pour les aider dans leur propre parcours ?
Camille Montaz : Oui, il va falloir que j’essaye de synthétiser. L’essentiel, je pense que la toute première étape, déjà, c’est peut-être juste d’accepter qu’on a un trouble. Parce que je pense que souvent, on est un peu dans une sorte de fuite en avant qui nous empêche aussi de se lancer dans un projet de guérison. Cette fuite en avant, c’est aussi de se dire : « Non, mais en fait, ce n’est pas très grave. Je sais que parfois je fais des petites crises, mais en fait, ça va partir tout seul. » Parfois, on se trouve un peu des excuses comme ça. Enfin, moi, j’ai fonctionné comme ça pendant des années parce qu’en fait, j’avais peur aussi de me confronter à ce trouble et peut-être peur de changer, aussi, parce que finalement, ce trouble, c’est aussi une béquille, parfois dans notre vie. C’est la façon dont on fonctionne depuis des années, et s’imaginer sans, ça fait un vide un peu. Donc, moi, j’ai eu cette phase-là pendant longtemps.
Le moment où je me suis dit : « Ok, en fait, je souffre de dermatillomanie, mais ce n’est pas grave. En fait, il y a des solutions. Il y a d’autres personnes qui en sont atteintes. » Et là, on se met dans cette dynamique de « Ok, je vais pouvoir agir pour changer ça ». Donc déjà, ça, je pense que c’est essentiel.
Et après, la deuxième étape, c’est d’être dans l’action. C’est de vraiment pas attendre qu’il y ait un déclic. Moi, je sais que je me disais beaucoup : « Un jour, je vais avoir une crise qui sera plus forte qu’une autre et ça va me faire un déclic dans mon cerveau, et je vais arrêter d’un coup. » Tu vois, on a beaucoup ce truc-là, parce qu’en fait, ce serait tellement magique que ça fonctionne comme ça. Mais en fait, c’est malheureusement pas possible.
C’est un trouble qui fait partie de notre quotidien et qui a plein d’actions qu’on répète en permanence et qui alimentent ces comportements. Et en fait, malheureusement, la volonté seule de s’en sortir n’est pas suffisante. Donc, ce point, c’est vraiment de se mettre dans l’action, de se dire : « Ok, à partir de maintenant, je vais observer quand est-ce que je fais des crises, comment elles arrivent, qu’est-ce qui les déclenche ? Quelles habitudes je peux essayer de supprimer, de remplacer, ou de changer pour éviter de me mettre dans ces états-là ? »
En fait, il y a toujours des choses à faire, même quand on se dit : « Non, mais moi, je m’écris, c’est un peu tout le temps. » En fait, avoir ce regard vraiment extérieur de se dire : « Ok, non, mais je vais juste essayer de comprendre cette dermatillomanie, comment elle agit dans ma vie, qui elle est, qu’est-ce qu’elle fait ? » En fait, ça, souvent, c’est une première étape fondatrice.
Et puis après, je pense que ce qu’on disait tout à l’heure sur l’hygiène de vie, c’est assez capital aussi. Donc, d’essayer, si on peut, de consulter un naturopathe ou un médecin formé aux pratiques de nutrition, et essayer juste de ne pas changer drastiquement. Parce qu’on est souvent dans cette dynamique de perfectionnisme. On se dit : « Ok, à partir de maintenant, je change toute mon hygiène de vie, je vais faire trois fois du sport dans la semaine, je vais boire deux litres d’eau par jour, et je vais manger parfaitement. » Moi, j’ai été aussi comme ça. Et je sais qu’en fait, souvent, ça marche une semaine, et puis on arrête tout parce qu’on se met tellement de pression qu’en fait, c’est trop.
Je pense que dans tout ce qui est hygiène de vie, déjà, on peut juste se dire qu’on peut ajouter plutôt que supprimer. Donc déjà, si on sent qu’on consomme pas assez de légumes, en fait, juste à chaque repas, on essaie d’en ajouter un petit peu. Si on sent qu’on mange peu de fruits, à chaque goûter, on peut prendre un autre gâteau habituel, mais rajouter un fruit ou des graines ou des oléagineux. Peu importe, mais je pense que déjà ça, ça peut faire une différence.
Et en fait, ça crée un cercle vertueux parce que plus on se prend en main volontairement en se disant « Je vais rajouter des bonnes choses dans ma vie, dans mon assiette, dans mes activités », plus on en fait, et notre corps nous en demande plus. Et on se dit : « Tiens, en effet, je me sens mieux. J’ai envie de continuer. »
Donc, je pense qu’en faisant ces trois étapes : accepter son trouble, se mettre dans l’action, et donner un petit coup de pouce à son corps en lui apportant du bien, ce sera déjà des super étapes.
Caroline Lepinteur : Merci pour ces précieux conseils qui résonnent complètement avec moi. Ce que j’ai pu vivre, c’est cette question d’identité avec le trouble ou la maladie.
C’est vrai qu’on a l’impression que quand on se fait diagnostiquer avec une maladie, on est la maladie, on vit tous les jours avec. Donc, c’est important ce que tu disais de bien s’en détacher et pour pouvoir avancer et l’accepter, mais ensuite se mettre en action pour en sortir. Et puis aussi, oui, ce côté de la prise en charge globale, c’est essentiel pour aller mieux. Donc je suis à 100% d’accord avec toi.
Caroline Lepinteur : Comment on peut prendre contact avec toi, Camille ?
Camille Montaz : Le plus simple, ce sera sur Instagram @possible. Après, j’ai aussi un site possible.fr où il y a plein d’informations sur la dermatillomanie, sur les symptômes, sur la façon d’aider si on est un proche, plein de ressources.
Et puis après, dans le lien qu’il y a dans mon compte Instagram, il y a le lien vers mon podcast et ma newsletter, etc. Donc voilà, j’espère que ça peut être assez clair.
Caroline Lepinteur : Génial ! Écoute, c’est top. Je partagerai tout ça dans la description. Un grand merci pour ton partage. C’est tellement précieux de pouvoir diffuser ton message pour toutes celles et ceux qui peuvent souffrir de ce trouble qui, comme tu le dis, est encore peu connu. Donc, merci à toi, Camille.
Camille Montaz : Merci à toi, Caroline !
Caroline Lepinteur : Je t’embrasse et je te dis à très bientôt !
Camille Montaz : À bientôt !
Et vous, que vous inspire le parcours de Camille ?
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Merci pour votre engagement, et à très vite pour de nouveaux témoignages inspirants !
Chaleureusement,
Caroline
Un article très éclairant sur la dermatillomanie et ses impacts psychologiques.
Le témoignage de Camille Montaz est vraiment inspirant et montre qu’il est possible de guérir de ce trouble.
Merci pour ces conseils pratiques et réconfortants ! 🙂
Merci beaucoup pour ton retour Rémi 🙂 ! Je suis ravie que l’article t’ait apporté des éclaircissements et que le témoignage de Camille t’inspire. Son parcours est en effet un bel exemple de résilience et de guérison.
Merci pour cet échange et ce témoignage inspirant. Pouvoir des mettre des mots sur les maux est une étape tellement importante dans le processus de guérison.
Merci à toi pour ce joli commentaire 🙂 ! Tu as tout à fait raison, mettre des mots sur nos souffrances est une étape essentielle vers la guérison.